Même s'il n'y avait pas d'électricité, les deux mecs ont tenu à amener le frigidaire qu'ils avaient trouvé en haut de la French Hill. Ils avaient une vieille Dodge Caravan ou quelque chose dans le genre, et elle était bourgogne. Elle ne rouillait pas; la carrosserie était en plastique.
Là où ça a commencé à mal aller, c'est quand ils ont voulu redescendre de la montagne. La batterie était à plat, le char ne démarrait plus. Et comme il n'y avait pas vraiment de chemin sur la montagne, et que personne ne voulait démolir sa voiture en essayant d'aller leur porter secours, il a fallu redescendre la van de la montagne à bras.
J'eus beau tenter de les convaincre, rien n'y fit: ils voulaient que je sois celle qui conduise, pendant qu'ils poussaient. C'est vrai, mes bras étaient bien inutiles quand venait le temps de forcer, mais tout de même, il faisait presque nuit et je ne voyais rien, et quand bien même qu'on m'eut crié gauche ou droite, moi ces deux-là je les avais toujours mélangés.
Je me suis assise derrière le volant, persuadée que j'allais frapper une roche, ou un arbuste, ou une racine, ou un nid-de-poule, ou encore une tente qui se trouvait juste à la sortie d'une courbe et dont le propriétaire refusait de se rendre à l'évidence qu'il serait plus sage de la déplacer. Les cahots de la route étaient effrayants et plus d'une fois j'ai pensé que la voiture allait renverser. Je freinais systématiquement dès que j'atteignais le 5 km/h, au grand désespoir de ceux qui tentaient de me livrer à la force de gravité. Miraculeusement, je n'ai que frôlé la tente. Mes talents n'étant plus requis pour la dernière ligne droite, on m'a finalement remplacée.
Aux dernières nouvelles, ils n'avaient toujours pas remonté la colline pour aller chercher leur frigidaire.
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