samedi 27 novembre 2010

cette insupportable nouvelle année

Le jour de l'An, c'était traditionnellement du côté de ma mère que ça se fêtait. Au début c'était l'fun, malgré le fait que je ne recevais pas de cadeaux. On dansait, principalement. Des set-carrés. Des rigodons. Des gigues. Puis ma parenté est devenue âgée, on n'a plus voulu faire l'effort de s'accueillir l'un l'autre. On a loué une salle. Pour une ambiance stérile, c’en était toute une. Un peu plus et on passait la veillée à l'hôpital.

Les discordes au sujet du buffet (de la dinde, oui ou non?) ont fini par avoir raison de notre unique rencontre annuelle, tant et si bien que depuis, j'ai passé le jour de l'an chez moi en ermite. C'est qu'évidemment, à Montréal, il ne se passe pas grand-chose d'intéressant si on n'est pas invité à un méga-party. Alors on se console en écoutant les versions longues du Seigneur des Anneaux, et on attend que ça passe, comme la grippe.

Mais j'ai d'autre raison de trouver le jour de l'An insupportable. D'abord, cette histoire de résolutions. Comme si on allait changer du jour au lendemain, juste parce qu'on change de calendrier. On se fait croire dur comme fer que cette cigarette, c'est la dernière, mais ça ne marche JAMAIS. Pourquoi? Parce que les choses qu'on veut changer, on les change sur-le-champs, et celles si on ne veut pas vraiment changer, on remet ça à plus tard. Genre, l'année prochaine. C'est d'une navrante mauvaise foi.

Et puis le jour de l'an signe l'arrêt de mort des vacances de Noël. Après, y'a pu rien à fêter. Ok, les rois mages peut-être, mais ça reste une histoire de gâteau avec un pois sec caché dedans. C'est le retour à l'école, au travail, le come-back du réveil-matin. On regarde avec réticence ces longs mois de froidure à venir, et on soupire...

La vie continue. N'empêche que le jour de l'An, c'est plate. Ça ne signifie rien, sinon que de changer l'année quand on écrit la date. Mais c'est quoi, au final, une année? Plein de jours. Un jour de plus, un jour de moins, c'est du pareil au même. Comme si ça pouvait vraiment nous rendre heureux de se rendre compte qu'on vieillit, que le temps passe trop vite, ou pas assez, qu'on n'a jamais fait autant de choses qu'on voudrait, que tout est toujours à recommencer.

Je hais le jour de l'An. Ça me déprime. Mais Pâques, par exemple...

vendredi 26 novembre 2010

première neige...

Le fait d'avoir failli me ramasser les quatre pattes en l'air ce matin m'a enfin confirmé la venue de l'hiver. En effet, chaque année, l'hiver vient. Et avec la venue de l'hiver, c'est la venue de la neige, c'est la venue du froid qui glace, des lèvres gercées, des mitaines perdues, des chocolats chauds, mais surtout, oui, surtout, c'est la venue de NOËL!

Je suis une fan inconditionnelle de Noël. Pourtant, j'ai peu de raisons de l'être. À mon âge, je ne reçois plus de cadeaux. Le seul party de Noël auquel je sois invitée, année après année, est celui de ma famille paternelle. Je suis apostasiée, donc le petit jésus pis les anges, c'est pas pour moi. J'ai jamais aimé le magasinage. Jamais aimé la dinde non plus (la morte, pas la vivante).

Néanmoins, j'ADORE les lumières de Noël! Ça met de la magie, même en avril! Noël est une formidable excuse pour rester chez soi et s’empiffrer jusqu'à plus faim. On voit toujours de bons films avec Adam Sandler à la télé dans le temps des fêtes. À Noël, on n'a pas d'examens, pas d'école, et pour les chanceux comme moi, pas de travail non plus. Le temps de Noël est idéal pour envoyer des courriels et des cartes à ces amis qui sont si loin mais qu'on aime tant. On peut même faire des séances de photos cocasses avec les chats et Justin Trudeau. Quoi de mieux que de faire jouer Casse-Noisette de Tchaikovsky à tue-tête en buvant un bon verre de vin? Quoi de mieux que de s'emballer dans les édredons et de manger une énième orange en chocolat qu'on doit préalablement casser par terre?

Sérieux, Noël, je t'aime.

Demain: Pourquoi je hais le jour de l'an.

mercredi 24 novembre 2010

le complot

Depuis la terrasse qui surplombe le hall d'entrée d'un building dont la façade est entièrement fenestrée se jette la fillette. Elle veut rattraper sa peluche. On lui a pris et balancé par-dessus la balustrade. Un crochet la rattrape par le pantalon, et elle pend au-dessus de ces sept étages de vide, la tête en bas. La décrocher, oui, et lui rendre sa peluche, mais en passant par l'escalier.

Les plus jeunes marchent la tête basse, regardent le sol, évitent les regards, rasent les murs. Leur soumission est ostensible. Dès qu'ils le pourront, ils quitteront cette école pernicieuse.

Certains de pavanent en paons. Ils ont de grosses montres, de beaux habits neufs, propres, achetés par leur papa, repassés par leur mère, leur servante de mère. Ce sont les espoirs de demain: déjà ils règnent sur leur monde, le microcosme de cette société que leur aïeux ont bâtie. Ils représentent la hiérarchie et s'acharnent à la perpétrer. Surtout, punir ceux qui osent marcher le dos droit.

Bientôt, les sourires s'élargissent, les regards se font complices, mais occupé à regarder le sol, le peuple ne le remarque pas. Certaines chambres se vident peu à peu: on rapatrie les petits frères, les petites soeurs, les benjamins de cette élite omnipotente. Faire comme si on n'avait pas constaté, bien sûr, et se sauver, s'échapper, malgré l'urgence, marcher doucement. Raser les murs. Sortir d'ici.

Ceux qui exécuteront les ordres déjà s'enferment dans le bunker, au coeur de la bête, de cette forteresse du joug. Trembler de peur, de peur de se faire découvrir, débusquer, de peur d'écrire sur son visage la volonté de s'échapper. Prendre le petit, fragile, par la main, le guider vers la sortie. Passer près du bunker, frémir une dernière fois, passer son chemin et pousser la porte.

Si bien barricadés qu'ils soient, l'explosion entre jusque dans leur sécurité. Les morceaux du collège poussent la porte et s'invitent dangereusement près de leurs corps sans carapaces. Mais la chance a un penchant pour leur témérité, elle leur offre une issue par laquelle ils sortiront en vainqueurs. Un sourire bourru de leur papa, une effusion de larme de leur mère, leur esclave de mère. Les espoirs de demains.

Accroupie autour du petit, sous les regards suintants de connivence du monde, l'explosion a soufflé la poussière loin devant nous. Un simple dos aura protégé du massacre ce fétu de vie. Les deux insignifiances que le monstre aura abdiquées s'empresseront de disparaître et rêveront de ne pas être des prochains innocents qu'on massacrera au nom de l'évolution.

dimanche 21 novembre 2010

La fois où on est allé à la montagne pour creuser un chemin

Riobamba, juin 2007

Au pied de la montagne appelée Chimborazo, se trouve un village autochtone appelé Santa Anita. Nous, on habitait dans ce village dans un camp spécial conçu pour les touristes altermondialistes afin de nous familiariser avec les moeurs et coutumes de l'Équateur, et de faire travailler un peu nos jeunes muscles à une altitude élevée (on parle ici de plus de 3000 mètres d'altitude).

Faisant des Astérix de nous-même, nous avons affronté de terribles travaux, tels le nettoyage manuel de la route du village, le désherbage du parc municipal ou encore le labourage de jardin communautaire sous la pluie avec un outil par tranche de 4 étudiants. Mais le plus mémorable de nos périples fut définitivement celui qui nous entraîna au coeur des brumes de la montagne-dieu, le Chimborazo.

Empaquetés dans une boîte de camion, nous avons été ballottés pendant une bonne heure jusqu'à ce que le camion se déclare en panne d'essence. À partir de ce point, il a fallu marcher une quarantaine de minutes sous une pression atmosphérique qui nous écrasait les poumons et ce faisant, perdre quelques compatriotes de faible constitution, pour finalement pouvoir se mettre au boulot. La tâche était simple: bêcher le chemin envahi par les herbes pour le rendre à nouveau praticable, au cas où des voitures auraient assez d'essence pour y parvenir. Au bout d'une grosse demie-heure tout au plus, on annonça que le dîner serait servi dans une cabane voisine de quelques dizaines de mètres. Le groupe marcha pendant presqu'une heure avant d'atteindre la hutte convoitée. Le dîner n'y était pas. Ce n'est que deux heures plus tard et quelques doigts gelés en extra qu'on apprit que le camion était de nouveau en panne.

On descendit de la montagne à pied, en chantant, en glissant, et parfois même en jurant, à travers les hautes herbes mouillés et glacées. Vers trois heures de l'après-midi, on mangea à même le sol de la soupe chaude (non, ils n'avaient à ce jour pas encore découvert les sandwichs). Il n'était plus temps de retourner travailler; on prit donc le chemin du retour. Puisqu'on passait par là, on s'affaira quelques minutes à solidifier un pont, et tant qu'à y être, on se fit attaquer par une horde d'alpagas hostiles.

Mine de rien, nous fûmes fatigués, et dormîmes comme des bébés.

Ce fut ce qui s'appelle une journée efficace.

vendredi 19 novembre 2010

L'attaque de la femme-perdrix, suite et fin...?

Les plumes furent envoyées au laboratoire: perdrix, conclurent les experts. Les meilleurs ornithologues furent dépêchés pour trouver dans cette jungle urbaine un milieu où elle aurait pu s'établir. "Les perdrix sont des animaux qui vivent en famille", déclara l'un d'eux. "Peut-être cherche-t-elle un mâle?"

Ils s'affairèrent donc à recueillir une quantité suffisante de plumes pour couvrir un homme de taille moyenne. On lui attacha des postiches d'ailes et son corps fut enduit de phéromones aviaires. On lui enseigna longuement les rudiments du chant de la perdrix et on l'envoya se promener dans le grand parc boisé de la ville. Il ne fallut que quelques heures pour qu'un spécimen de perdrix ne vienne à sa rencontre. Elle avançait par à coup, timide, jusqu'à n'être plus qu'à un mètre de l'agent d'infiltration. Il poussa une plainte d'oiseau blessé, et après quelques répliques de sa congénère, elle l'invita à la suive.

Après une marche de quelques minutes dans les bois, ils arrivèrent à un arbre dont la racine cachait une ouverture. Avant de descendre, le mouchard s'assura de sonner l'alerte grâce au GPS qu'il tenait à la main, invisible car cachée dans la fausse-aile. Cette précaution lui fut salutaire, car aussitôt dans l'antre de la bête, elle se lança sur lui, aucunement trompée par son déguisement. Une lutte féroce s'amorça. L'homme, qui était entraîné au combat, se débarrassa vite de ses ailes pour se servir de ses bras. Il tenta de lui faire une clef-de-bras, mais force lui fut d'admettre qu'elle n'en possédait pas. Son désarroi laissa le champ libre à la femme-perdrix, qui prit le dessus et s'attela illico à lui picorer le visage.

C'est à ce moment que survint l'équipe d'intervention tactique. Surprise, la créature prit la fuite mais sa connaissance des dédales souterrains n'empêcha pas les policiers d'être sur ses talons. Tout à coup, le tunnel s'effondra et un amas de terre s'abattit sur la tête de la perdrix. Malgré leur zèle, les policiers ne purent la déterrer à temps, et sa mort fut constatée sur place.

En fouillant les tunnels habilement creusés, les forces de l'ordre retrouvèrent la deuxième victime, apeurée mais saine et sauve, ainsi que plusieurs ossements qui se révélèrent être humains.

La ville retrouva son calme et les citadins purent retourner à leur magasinage l'esprit tranquille. Néanmoins, tous durent admettre que le mal n'est jamais bien loin...

*Aucune perdrix ne fut blessée lors de l'élaboration de ce scénario.

mardi 16 novembre 2010

les boîtes vocales

Avant l'invention des boîtes vocales, on n'avait pas le choix de répondre au téléphone. Quand il sonnait, on ne pouvait pas se dire: "Bah! Qu'ils laissent un message" en se prélassant interminablement sur le sofa. Avant l'invention des boîtes vocales, quand on appelait quelque part et que ça répondait pas, on était certain que la personne n'était pas là. Ainsi ça nous évitait de rappeler une deuxième et une troisième fois, juste au cas-où.

Et puis il y a ce jeu, celui qui consiste à laisser un message sur le répondeur de celui qui nous en a laissé un. Des heures de plaisir. On dirait que depuis l'avènement du répondeur, les dépenses liées au service à la clientèle ont drastiquement diminué. Plus besoin d'avoir autant de personnes aptes à répondre qu'il pourrait rentrer d'appels: on met un répondeur qui embarque si la ligne est occupée. Ou mieux: on met une de ces affreuses machines automatiques avec une voix de robot ou de tite-madame: "Pour le service en français, faites le / appuyez sur le / pesez su'l piton Un." Ce désagrément est tellement répandu que c'est rendu qu'il y a des compagnies qui se font une clientèle en offrant un service non-robotisé!

Certes, ça a simplifié nos vies sous plusieurs aspects, genre plus besoin de rester à la maison quand on attend un appel. Sauf que parfois on a juste besoin d'une information niaiseuse pour laquelle on n'a pas envie de laisser un message. Ou encore c'est une situation bien trop compliquée. Ou on veut juste une réponse tu-suite, bon. Mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué? Un appel, une réponse, non merci. Un appel, un message, voilà qui est beaucoup mieux!

En tout cas c'est déjà plus efficace que l'afficheur: oui, tu sais qui appelle, mais pour savoir pourquoi, faut quand même répondre! Et le classique "Oui on vient de m'appeler sur mon cellulaire de votre numéro mais je sais pas c'était qui, est-ce que je peux parler avec cette personne-là?" Désespérant.

dimanche 14 novembre 2010

L'attaque de la femme-perdrix, part 2

Il ne fallut que quelques minutes pour que les policiers arrivent sur les lieux. La jeune femme, sous le choc, ne leur était d'aucune aide. Elle ne faisait que balbutier, encore et encore: "Des serres... un bec... une femme..." Les agents, par équipes, s'élancèrent à l'assaut des toits. Déjà les badauds s'attroupaient devant les édifices et la rumeur courait: "Il paraît que c'est un oiseau!" "Non, un monstre!"

Les équipes tactiques s'activaient tout là-haut. De façon concise, ils fouillaient chaque recoin, soulevant chaque trappe et explorant chaque escalier, jusqu'au moment où l'un des policiers aperçut une forme noire quelques bâtiments plus loin. Comme elle paraissait immobile, son équipe profita de l'obscurité pour s'approcher discrètement, se planquant derrière chaque obstacle pour prendre la femme-perdrix par surprise. Mais lorsqu'ils ne furent qu'à quelques mètres d'elle, elle se retourna vivement, montrant un visage cauchemardesque mi-humain mi-oiseau, et poussa son cri guerrier.

"Elle nous a piégé", pensa le plus jeune des agents. En effet, l'instant d'après elle avait déjà sautillé jusqu'au bord de l'immeuble où l'attendait l'homme toujours inconscient. S'en saisissant, elle sauta par-dessus le remblais, laissant quelques plumes derrière elle. Les policiers dégainèrent leurs armes et tentèrent de l'abattre, mais leurs efforts firent mouche furent vains et elle disparut à nouveau.

Les escouades revinrent penaudes de leurs recherches après avoir ratissé tout le quartier, eux qui avaient pourtant été si près d'appréhender cette étrange criminelle. Les rares témoins qui étaient restés pour le dénouement durent renoncer à une explication et retournèrent se coucher. Sous la neige qui tombait toujours s'effacèrent une à une les traces des évènements...

On retrouva l'homme trois jours plus tard dans ce qui semblait être un grand nid fait de branches entrelacées, parsemées de plumes et de fientes d'oiseau. Bien qu'il était encore en vie, il ne faisait que pousser de faibles cris, à la manière d'un oisillon. Les analyses poussées qu'on effectua à l'hôpital révélèrent qu'il avait été nourri de vers et d'autres insectes. Son torse et ses bras étaient parsemés de petites morsures et de lacérations. On ne put en tirer aucune information et il fut envoyé à l'hôpital psychiatrique.

Il ne retrouva pas la raison.

Quelques jours plus tard, on signala une nouvelle disparition...

À suivre...

vendredi 12 novembre 2010

L'attaque de la femme-perdrix

La ville paraissait endormie sous la moelleuse couche de neige fraîche. On était en décembre, déjà, et les Fêtes approchaient. Demain, les passants chargés de paquets sillonneraient les rues à la recherche du cadeau idéal, de la perle rare qui gagnerait le coeur de l'être aimé ou de la belle-mère honnie. Mais pour l'instant, seul subsistait une femme frêle, ensevelie sous un poncho et une montagne de châles, qui abritée sous un porche tendait mollement la main.

La nuit égrena silencieusement ses heures et finit par s'éclipser. L'aurore éclaira timidement le ciel. La femme était toujours là.

Toute la journée, un perpétuel va-et-vient anima la rue. L'air froid et sec n'avait pas découragé les voraces consommateurs, qui passaient devant la femme sans lui dédier un regard. Une nouvelle nuit s'annonça rapidement, et les irréductibles traînèrent encore un moment devant les vitrines illuminées. Dans la pâleur des réverbères, des flocons orphelins ajoutaient de la magie à la veillée.

Puis, au moment où la rue reprenait enfin son souffle, elle passa à l'action. S'avançant vers un couple enlacé qui déambulait négligemment, elle commença par déballer sa sempiternelle litanie: je suis malade, je suis vieille, je n'ai nulle part où dormir... Les jeunes gens, tout à leur malaise, ne remarquèrent pas son regard malveillant, et lorsqu'ils se détournèrent pour s'éloigner, la femme-perdrix empoigna l'amoureux par l'épaule, dévoila ses ailes et lança un cri strident. Puis, enfonçant ses serres aiguisées dans la chair tendre de sa prise, elle s'engouffra dans une ruelle sombre et se hissa par une échelle de secours jusque sur les toits.

Pendant que la jeune femme, entre terreur et sanglots, appelait frénétiquement à l'aide, la silhouette de l'étrange couple que formaient la femme-perdrix et son prisonnier inconscient se découpa dans le clair de lune. Elle lança un dernier cri qui glaça le sang des habitants du quartier jusque dans leur sommeil, puis disparut dans la nuit.

À suivre...

mardi 9 novembre 2010

La fois où on voulait acheter de l'alcool et qu'on n'avait pas l'âge

Santa Cruz, août 2008

De désespoir de s'être fait abandonnés par notre hôte couchsurfing à San Francisco, les copains et moi avons décidé de descendre 200km vers le sud pour y faire du camping. En arrivant dans la ville convoitée, on s'est arrêté acheter de quoi manger dans un supermarché. Évidemment, on a fini par dériver vers la section alcool, et, surprise! c'était moins cher qu'à la SAQ. Drastiquement moins cher, je dirais même.

Alors en jeunes québécois bon vivants que nous étions, de nous exclamer sur les prix ridiculement bas:

-Hen, 17$ pour 1,75 litre de vodka!

-Alexis, tchek ça, 1,75 litre de capitan morgan brun pour 20$!

-Malade, une bouteille de bon vin à 4,50$, jla veux trop!

Nos cris allègres ont tôt fait d'attirer les deux seuls autres québécois de l'épicerie, qui eux, avaient plus de 21 ans (c'était ma fête deux jours plus tard!) Alors on leur explique notre plan diabolique: ils achètent l'alcool en faisant semblant de ne pas nous connaître, et nous, on la boit.

Aussitôt dit, aussitôt fait. En rejoignant nos acolytes dans le stationnement, on s'est rendu compte qu'eux non plus ne savaient pas où dormir. On a donc pris la route vers le terrain de camping national le plus près. On savait qu'il était plein, mais comme il était tard, on est quand même rentré et on a trouvé un beau morceau de gazon pour mettre nos tentes dessus, avec en prime une table à pique-nique! Les voisins ont dû nous détester, mais nous, on a eu ben du fun ce soir-là.

Le lendemain, on s'est réveillé avec une facture dans le pare-brise de la voiture. On a payé et on est parti à la plage.

dimanche 7 novembre 2010

le changement d'heure

Il y a de ces journées où on a l'impression de toujours être à côté de la plaque, on est confus, mélangé, ou la réalité nous paraît carrément nébuleuse. Ces journées surviennent en général la fin de semaine, quand on se donne le droit de ne pas avoir d'horaire (même si dans les faits on a plein de choses à faire), on se lève tard, on se couche tard, on dort longtemps. On regarde dehors, il fait gris, il fait froid, et on retourne vaquer à nos non-occupations sous les édredons. L'automne est une période propice à l'extension de ces habitudes.

Quand finalement on tente de mettre notre temps libre à profit, c'est pour s'apercevoir qu'il en reste trop peu, ou alors on reçoit un coup de fil, un courriel, on trouve toujours une raison pour repousser les impératifs. Mais jamais on n'arrivera à se débarrasser de cette pointe de culpabilité, celle qui pique le coeur, doucement, tendrement, pour rappeler que c'est mal, procrastiner.

Eh bien aujourd'hui, on a pu procrastiner nébuleusement une heure de plus, gracieuseté du changement d'heure. Toute la journée, on aura cherché à se convaincre qu'il était en réalité plus tôt que ce qu'il ne paraissait, mais on l'aura oublié sitôt l'horloge regardée. Bien sûr, on aura négligé de changer l'heure du cadran et certains préféreront adapter l'heure de l'alarme pour les prochains jours plutôt que de faire l'effort de remettre les pendules à l'heure.

Mais forcément, un jour, tout rentrera dans l'ordre: dans une semaine, un autre samedi nous gardera au lit, dans un mois, il fera noir au déjeuner comme au souper, et au printemps, on reviendra à l'heure d'été.

jeudi 4 novembre 2010

La seconde vie

Il faisait chaud, péniblement chaud.

La saison avait pourtant été pluvieuse. L'humidité avait défraîchi le papier peint et laissé derrière elle une odeur lourde de renfermé. La scène qui avait dû jadis paraître bucolique faisait maintenant état d'un abandon triste. Les herbes hautes, qui barraient le sentier menant à la cabane champêtre, semblaient tenter de s'en emparer pour la réduire à rien dans une interminable digestion.

Mais cette excessive verdure apportait une fraîcheur qui contrastait avec la moiteur fétide de la maisonnette.

On y ouvrit les fenêtres et en sortit la literie, les meubles. Bientôt les carreaux et les planchers furent lavés. Le sentier fut rafraîchi. Et surtout, on arracha cet infect papier peint.

La maison fut réhabilitée. Pour la première fois depuis la maladie de leur mère, les enfants s'y sentirent chez eux. Ils y passèrent tous les dimanches d'automne, jusqu'aux premiers grands froids, qui les forcèrent à la délaisser pour la saison froide.

Mais on promit qu'on y reviendrait, en mai, à temps pour les muguets.

mardi 2 novembre 2010

La fois où on a fait du camping illégal et qu'on s'est fait réveiller par la police

Tofino, août 2008

On est arrivé sur le pouce dans cette ville grise et brumeuse, sans réservation dans une auberge de jeunesse, il va sans dire. La première nuit, une annulation de dernière minute nous avait permis de dormir au chaud dans ce qui ressemblait à un bed and breakfast. Mais au fil des rencontres, on s'est rendu compte que dormir gratuit, c'était possible. Suffisait de trouver le bon endroit.

Sauf que nous, paresseux, on n'a pas voulu s'enfoncer loin dans la forêt, alors on a attendu la tombée de la nuit et on a cherché un endroit un peu retiré de la route, près de quelques arbres qui nous couvriraient.

Ce qu'on a (cru) trouver dans la cour de l'école primaire du village.

On a monté la tente derrière le banc des joueurs du terrain de baseball et on s'est couché. On se trouvait ben malins. Mais on s'est fait réveiller par ce qui semblait être un tremblement de terre: les murs bougeaient, le bruit était agressant, et la surprise, de taille. La voix du policier nous a ramenés à la réalité: "Is there someone in there?"

Merde...

Et pourtant! On avait mis le réveil à 7h, pour prendre de vitesse une potentielle découverte. Mais il était 6h50 et on s'était fait prendre. C'est vrai que de la rue, elle était vraiment visible, notre tente.

Alexis a payé l'amende. Curieusement, ça revenait moins cher que le bed and breakfast. Depuis ce jour, elle trône sur notre frigo.